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  • : Le site de Attac Villeneuve d'Ascq
  • : Site du comité local d'Attac France de Villeneuve d'Ascq (59) à destination des militants et sympathisants. Fondée en 1998, Attac promeut et mène des actions de tous ordres en vue de la reconquête, par les citoyens, du pouvoir que la sphère financière exerce sur tous les aspects de la vie politique, sociale, économique, environnementale et culturelle dans l’ensemble du monde. Attac est un mouvement associatif altermondialiste et d'éducation populaire reconnu par l'Etat.
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1 septembre 2012 6 01 /09 /septembre /2012 06:47

AttacEn rejetant le Pacte budgétaire, députés et sénateurs peuvent refuser l’austérité perpétuelle et relancer le débat en Europe

« Le poids de la dette est devenu écrasant. L’État verse ainsi près de 50 milliards d’euros par an à ses créanciers. Cette somme représente la première dépense, juste devant le budget de l’Éducation nationale; elle est supérieure aux budgets de la recherche, de la justice et de la sécurité réunis. C’est inacceptable ! La dette, c’est moins d’écoles, moins de crèches, moins d’hôpitaux, moins de transports publics...»

C’est Jean-Marc Ayrault qui parlait ainsi de la dette publique dans son discours de politique générale en juillet dernier.

Mais pour remédier à cette situation, il reprend l’objectif affiché par François Hollande, une réduction à marche forcée du déficit public, visant 3% du PIB dès 2013 et le déficit « zéro » en 2017.

Ce n’est pas un hasard : le déficit « zéro » est l’objectif n°1 du Pacte budgétaire, le nouveau traité négocié par Sarkozy et Merkel pour imposer définitivement l’austérité comme seule politique possible en Europe.

François Hollande avait promis lors de sa campagne de rompre avec cette logique mortifère. Mais, à l’issue du sommet européen des 28 et 29 juin, le nouveau président français a finalement accepté de ratifier le Pacte.

Selon lui, il aurait obtenu des mesures de croissance permettant de « réorienter l’Europe ».

C’est faux : le Pacte budgétaire, inchangé, est toujours aussi nocif, et le pseudo-« Pacte de croissance » adopté le 29 juin n’est que poudre aux yeux. Au moment où l’Europe s’enfonce dans une inquiétante récession provoquée par les politiques d’austérité, ratifier le Pacte budgétaire signifie accélérer la course à la catastrophe.

1. Des coupes injustes et inefficaces

La soi-disant « règle d’or » stipule que l’État ne doit pas dépenser plus que ce qu’il ne gagne. Plus précisément : la différence entre les dépenses et les recettes de l’État ne doit pas dépasser 0,5 % du PIB, hors fluctuations conjoncturelles.

La crise financière a été provoquée par la finance dérégulée. Mais à peine sauvés par l’ État, les banquiers ont profité des déficits publics provoqués par la crise pour lancer un nouvel assaut contre l’ État social.

Avec leurs alliés (instances européennes, chefs d’État et de gouvernement), ils ont décidé de réduire brutalement les droits sociaux. Le Pacte budgétaire s’inscrit ainsi dans la lignée des plans d’austérité menés dans toute l’Europe, qui se ressemblent tous : coupes dans la fonction publique (suppressions de postes, gel ou réduction des salaires) et dans les ressources des collectivités locales ; coupes dans la protection sociale (retraites, assurance maladie, chômage…) ; coupes dans les services publics (fermetures d’hôpitaux, de classes…).

Ces mesures sont socialement injustes car elles touchent en priorité les populations les plus précaires, les femmes, les jeunes, les classes populaires. Pas ceux qui ont organisé et profité de la spéculation et des profits boursiers et immobiliers ! Mais elles sont aussi économiquement désastreuses. La baisse des dépenses publiques accentue la récession qui diminue les rentrées d’impôts et de cotisations - avec pour conséquence une augmentation du déficit public que ces mesures étaient censées résoudre. La règle de plomb de l’austérité ne freine pas l’endettement… elle l’accélère ! Elle a déjà laminé les économies grecque, portugaise, espagnole, britannique…

2. Des hausses d’impôts... sans effrayer les riches

Pour réduire le déficit, les gouvernements disposent d’une autre option : augmenter les impôts. Les hausses d’impôts votées par le Parlement en juillet touchent davantage les plus riches et les grandes entreprises, et c’est une bonne chose. Mais pour les « économistes à gages » et le récent « audit » de la Cour des Comptes, il serait dangereux d’aller plus loin.

En effet le Pacte budgétaire conserve bien sûr la liberté totale de circulation des capitaux en Europe, ainsi qu’entre l’Europe et le reste du monde. Augmenter davantage les taxes sur le capital ferait fuir les fortunes…

Pour respecter la « règle d’or » c’est bien plutôt la hausse de la TVA qui est prônée par la Commission européenne, et qui est déjà intervenue dans tous les pays du Sud de l’Europe. En France, après l’annulation de la « TVA sociale » de Sarkozy, c’est une hausse de la CSG qui est sans doute programmée par le gouvernement pour « alléger le coût du travail ». Mais pourquoi réduire encore les cotisations patronales, alors qu’elles bénéficient déjà d’allégements considérables et inefficaces, qui coûtent 30 milliards d’euros par an à la collectivité ?

3. Austérité-compétitivité : un cocktail à risque

Réduire les déficits à marche forcée ne leur suffit pas : les instances européennes poussent partout au détricotage du droit du travail pour « améliorer la compétitivité ». Pouvoir licencier plus facilement, réduire les droits et accords collectifs, favoriser la négociation individuelle des salaires et des contrats de travail… c’est ce que prône le « Pacte de compétitivité » (adopté par le Conseil européen en mars dernier, en même temps que le Pacte budgétaire). Ainsi reviendraient à terme la compétitivité des entreprises et la sacro-sainte croissance ! En réalité, cela signifierait plus de précarité et d’inégalités, dans le droit fil de trois décennies de mondialisation néolibérale. Si croissance il y a, elle sera plus inégalitaire et prédatrice de la nature que jamais. Ne parle-t-on pas déjà en haut lieu de la reprise possible des expérimentations sur l'extraction des gaz de schistes ?

4. Une compétition mortifère dans la zone euro

Mais la recherche effrénée de compétitivité alimente elle aussi le cercle vicieux de l’austérité. L’Allemagne, depuis les années 2000, a réduit ses coûts salariaux et délocalisé à l’Est. Sa politique hyper-compétitive ainsi accomplie lui a permis de réaliser des excédents commerciaux énormes.

Mais si l’Allemagne exporte, c’est que ses partenaires importent : par nature, les excédents des uns sont les déficits des autres. Reste aux pays moins compétitifs à  s’endetter… puis, lorsque ce n’est plus possible, à s’imposer une «dévaluation interne» par une baisse massive des salaires et des budgets sociaux.

Le Mécanisme européen de stabilité (MES), qui complète le Pacte budgétaire, a ainsi été bâti comme un FMI européen : il « aide » les pays surendettés à rembourser leurs créanciers, avec en contrepartie une brutale cure d’austérité.

Ces saignées imposées aux pays surendettés ruinent les populations. Les exportations allemandes - pourtant si « compétitives » - n’y trouveront bientôt plus d’acheteurs. En outre la demande interne allemande a été durablement affaiblie par la stagnation des salaires. Le résultat, c’est que l’Allemagne risque fort elle-même d’entrer en récession en 2012 et peut-être même de commencer elle aussi à inquiéter les spéculateurs…

5. Un indicateur technocratique, arbitraire et instable

La règle d’or s’applique au « déficit structurel », le déficit public calculé en dehors des fluctuations économiques. Cet indicateur, issu de calculs complexes et pour une large part conventionnels, donne aux saignées budgétaires l’apparence d’une «rigueur» scientifique. Mais aucune méthode de calcul ne fait consensus au plan international, ni même à l’échelle européenne. Le FMI, l’OCDE, la Banque centrale européenne, la Commission, les gouvernements nationaux, les instituts économiques indépendants utilisent des méthodes différentes et parviennent à des résultats différents. Ces résultats sont eux-mêmes instables, sujets à des révisions d’une ampleur considérable au bout de quelques mois. Avec le Pacte budgétaire, les experts de la Commission auront toujours le dernier mot, quitte à se contredire dès l’année suivante. Comment inscrire une telle règle dans une Constitution ou une loi organique supposée intouchable ?

6. Une « règle d’or » absurde et injustifiable

L’objectif même de la règle d’or – le déficit zéro – n’a aucune justification économique. D’une part, la crise ne provient pas d’un endettement excessif des États : l’Espagne et l’Irlande avaient au contraire des budgets publics excédentaires avant la crise. Surtout, les déficits et l’endettement publics peuvent être parfaitement légitimes : l’État peut ainsi étaler des recettes et des dépenses (dont des remboursements d'emprunts) dans le temps pour financer des investissements d’avenir qui bénéficieront aussi aux générations futures. Aujourd’hui, il est plus que jamais nécessaire d’investir pour la transition écologique et sociale de l’économie ; l’État ne peut le faire sur la base de ses seules recettes courantes (les impôts).

C’est d’autant plus nécessaire dans un contexte de crise. Depuis les années 1930 on sait que l’État est le seul acteur susceptible de relancer l’activité économique quand les entreprises diminuent leurs investissements et que la consommation chute. Et pourtant l’Europe répète aujourd’hui les politiques déflationnistes de cette époque !

La « règle d’or » n’est pas une règle économique mais purement idéologique, un ultra-libéralisme qui vise à ôter à l’État toute marge de manœuvre. Mais le cercle vicieux de l’austérité - austérité, récession, déficits, dette, austérité… - peut avoir des conséquences politiques imprévisibles en Europe.

7. Une démocratie bafouée

Car le Pacte budgétaire n’est pas seulement lourd de menaces sur le plan économique et social. Jürgen Habermas, philosophe allemand qui avait soutenu le Traité constitutionnel européen, estime désormais que les réformes actuelles ouvrent une période de « domination post-démocratique ».

Avec le Pacte budgétaire et les nouvelles procédures européennes d’élaboration des budgets nationaux, ceux-ci doivent donner la priorité absolue au désendettement et à la réduction des déficits, et s’attaquer aux « déséquilibres » identifiés par la Commission… comme par exemple, un manque de « compétitivité ». Dans le cas où un gouvernement proposerait un budget considéré comme trop laxiste, des sanctions seront décidées par la Commission. Seule une majorité qualifiée des pays signataires (très difficile à obtenir) pourra s’y opposer. Les sanctions, jusqu’à 0,1 % du PIB (2 milliards d’euros pour la France), seront donc quasi automatiques. Pis encore : le pays « accusé » n’aura pas le droit de participer au vote ! En outre tout État pourra porter plainte auprès de la Cour de justice européenne contre un autre État qu’il jugerait trop laxiste.

Ce nouveau traité renforce donc considérablement les pouvoirs des instances européennes – Commission, Conseil, Cour de Justice – au détriment des Parlements nationaux, le Parlement européen demeurant largement hors jeu. Le Conseil Constitutionnel, en dispensant le gouvernement de réformer la Constitution, a préféré fermer pudiquement les yeux sur ce nouveau transfert de souveraineté.

8. L’austérité à perpétuité

Le Pacte budgétaire prévoit que la règle d’or ne puisse être remise en cause. Comme l’indiquait Angela Merkel, s’appuyant sur le texte du Pacte budgétaire : « la règle d’or va être contraignante et s’appliquer de manière permanente. Les règles ne doivent en aucun cas pouvoir être changées par une nouvelle majorité parlementaire. »

Selon le Pacte il faudra en effet adopter « des dispositions contraignantes et permanentes, de préférence constitutionnelles ». Et cela sans aucune limite temporelle : c’est donc bien l’austérité à perpétuité que garantit le nouveau traité. En outre des instances  « indépendantes » composées d’« experts » devront être mises en place au niveau national afin de contrôler le respect de la discipline budgétaire par les gouvernements.

Ces politiques seront rejetées par les peuples et ne peuvent qu’aboutir au discrédit de l’Union européenne. Les courants xénophobes et chauvins en seront terriblement renforcés.

9. Un « Pacte de croissance » illusionniste

Le 6 mai 2012, le soir de sa victoire, François Hollande annonçait que son élection représentait pour l’Europe l’espoir « qu’enfin l’austérité pouvait ne plus être une fatalité ». Il appelait à la renégociation du Pacte budgétaire. Pourtant, à peine deux mois plus tard, à l’issue du Sommet européen des 28 et 29 juin, il juge que « l’Europe a été réorientée » et annonce la «ratification rapide » du Pacte budgétaire négocié par Nicolas Sarkozy.

Pour justifier ce revirement brutal, François Hollande met en avant le soi-disant « pacte de croissance »: 60 milliards redéployés à partir de fonds déjà votés et programmés pour 2012-2013, et 60 milliards d’hypothétiques nouveaux prêts au secteur privé par la Banque européenne d’investissement. Un véritable tour de passe-passe, pour des montants fictifs qui n’atteignent même pas 1% du PIB européen !

Lors de la campagne présidentielle, il avait pourtant annoncé trois conditions à la ratification du Pacte :

- la mise en place d’euro-obligations, pour que les pays de la zone euro les plus fragiles puissent emprunter à des taux non prohibitifs ;

- la réforme de la Banque centrale européenne, pour donner aux États la possibilité de se financer en dehors des marchés ;

- des mesures de relance de la croissance en Europe.

Il n’a obtenu aucune avancée sur les deux premiers points. Sur le troisième, le marketing politique ne saurait faire illusion : les mesures annoncées sont dérisoires et largement fictives. Alors que l’application du Pacte budgétaire signifiera des coupes bien réelles dans les budgets publics, à hauteur d’au moins 60 milliards d’euros rien que pour la France d’ici à 2017.

10. Il y a pourtant des alternatives à l’austérité !

Rejeter le Pacte budgétaire est indispensable mais ce ne sera qu’un premier pas. Il faut imposer dans tous les pays un véritable débat démocratique autour des enjeux de la dette publique, des alternatives à l’austérité. Face à la menace de reculs démocratiques, sociaux, écologiques sans précédents, il est plus que jamais nécessaire de mettre en avant les alternatives. Il faut répondre aux questions essentielles : d’où vient cette dette ? Comment éviter l’austérité, et la destruction de l’État social ?

Une véritable solidarité européenne avec une intervention directe de la BCE pour dissuader la spéculation et sortir de l’asphyxie les économies des pays surendettés par de massifs investissements publics. Dans le même temps, des audits de la dette doivent aboutir à des restructurations importantes, avec participation du secteur privé.

Sortir le financement public des marchés financiers : les États doivent pouvoir emprunter directement à la Banque centrale européenne sans passer par les banques privées ; des mesures de relance publique et d’investissements massifs sont urgentes pour satisfaire les besoins sociaux, renforcer la convergence vers le haut des droits sociaux, et engager la transition écologique.

Lancer une révolution fiscale à l’échelle européenne, en taxant les riches et les profits et en mettant un terme à l’évasion fiscale et aux paradis fiscaux pour redonner des marges de manoeuvre à l’action publique.

Mettre les banques au service de la société : dissocier clairement les activités de banques de détail de celles d’investissement, de financement et de spéculation, mettre sous contrôle public et démocratique le secteur des banques et assurances dans le cadre d’un authentique service public bancaire.

Désarmer les marchés financiers : les paradis fiscaux, et tous les mécanismes spéculatifs comme le trading à haute fréquence, la vente à découvert, les marchés de gré à gré, les CDS et la spéculation sur les produits dérivés doivent être définitivement interdits. Une taxe ambitieuse sur les transactions financières doit voir le jour dans l’Union européenne ou au moins dans la zone euro.

Conclusion :
la crise politique européenne est inévitable, il faut l’assumer !

On nous dit : « la France essaie, mais l’Allemagne ne veut pas bouger » ; « il faut éviter la crise institutionnelle », « créer la confiance entre les dirigeants européens et avec les marchés financiers », « avoir de la patience »…

Mais la confrontation politique n’est pas entre l’Allemagne et la France ou l’Europe du Sud. Elle est entre un projet de construction européenne pour et par les marchés, et un projet d’Europe démocratique, écologique et solidaire.

L’adoption du Pacte budgétaire signifierait un renoncement à cette confrontation. Ce serait le premier acte politique majeur du quinquennat et – les précédents de 1982 et de 1997 le montrent – l’abandon de toute perspective alternative, alors même que l’extrême gravité de la crise la rend si nécessaire.

En Grèce, en Espagne, en France mais aussi en Allemagne des forces sociales potentiellement majoritaires ont un intérêt commun à réorienter radicalement l’Europe pour éviter le désastre social et démocratique en cours. La condition décisive : enclencher un vaste débat démocratique qui lève l’obstacle de la passivité et de la résignation populaire. En France, l’organisation par les pouvoirs publics d’un débat référendaire, et à défaut d’un référendum d’initiative citoyenne par la société civile, en serait un outil précieux.

Un rejet du Pacte budgétaire par la France serait le signal décisif pour enclencher une dynamique de refondation démocratique de la construction européenne. Aidons les députés et sénateurs de la majorité présidentielle à le comprendre !

Agissons !

Pour interpeller vos élus, ou vous renseigner sur la campagne menée par Attac et ses partenaires contre la ratification du Pacte budgétaire, rendez-vous sur :

www.france.attac.org

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29 juin 2012 5 29 /06 /juin /2012 12:11

AttacIl y a fort à parier que François Hollande sortira du sommet européen en proclamant avoir obtenu un compromis avec Angela Merkel. Mais il avait lui-même placé la barre à franchir: "nos amis allemands ne peuvent pas poser deux verrous à la fois, un sur les eurobonds et un autre sur le refinancement direct des dettes par la BCE", déclarait-il le lendemain de son élection. Alors qu'il a déjà renoncé à l'instauration rapide d'eurobonds pour mutualiser les dettes publiques européennes, le président de la République ne pourra se targuer d'un succès qu'à une condition: que la chancelière allemande accepte la possibilité pour la Banque centrale européenne d'intervenir directement pour aider les pays en difficulté. C'est la condition non pas pour sortir de la crise - bien d'autres mesures seraient nécessaires - mais pour soulager un peu la détresse des populations des pays attaquée aujourd'hui par les marchés financiers.

Pourtant, cela semble mal parti. Sauf grande surprise, en l'absence d'une volonté réelle d'établir un rapport de force, François Hollande se contentera d'un pseudo-pacte de croissance, avec 120 milliards annoncés (soit moins de 1% du PIB européen) , dont la moitié consiste en un recyclage de fonds structurels européens déjà prévus, et l'autre en d'hypothétiques partenariats public-privé financés par la Banque européenne d'investissement.

En revanche, il paraît désormais probable qu'il s’apprête à accepter le Pacte budgétaire. En fait de croissance, celui-ci va considérablement durcir les exigences de réduction des déficits publics et les mécanismes punitifs envers les Etats récalcitrants, donc les politiques d’austérité et la récession. Va-t-on vers une ratification à marche forcé par voie parlementaire en France ?

Sans doute sera-t-il également proposé, en conclusion de ce sommet, la mise en œuvre d’une taxe sur les transactions financières via une coopération renforcée entre pays de la zone euro. Ce serait un pas important si l'annonce était, cette fois-ci, suivie d'effet, et si l'assiette et le taux de la taxe permettaient de réduire réellement la spéculation et de dégager des ressources nouvelles. Mais cette annonce pourrait surtout servir à faire passer auprès de l'opinion publique la pilule de l'aide inconditionnelle aux banques et de l'aggravation de l'austérité.

La proposition de taxe portée par Attac depuis sa création en 1998 est nécessaire mais non suffisante pour sortir de la très grave crise économique dans laquelle est plongée l’Europe. C'est l'ensemble des produits financiers spéculatifs qui doivent être interdits. Une refondation de la zone euro est désormais incontournable pour sortir les Etats de la dépendance aux marchés financiers. Les véritables causes de la dette publique doivent être éclaircies, pour mettre à contribution non pas les salariés et les assurés sociaux mais les banques et les plus riches. En attendant, Attac, avec la Fondation Copernic et de nombreuses personnalités de la société civile, demande à François Hollande d''organiser un vaste débat démocratique sur le Pacte budgétaire, tranché par un référendum.

Attac France, le 28 juin 2012

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23 juin 2012 6 23 /06 /juin /2012 06:00

J.Gadrey2Monsieur le Premier Ministre, cher David Cameron,

Les citoyens français, dont je suis un modeste représentant, apprécient comme il se doit la sollicitude dont vous faites preuve à l’égard de certains d’entre eux. Votre souhait de les accueillir à bras ouverts, eux et leurs actifs financiers, ne peut que toucher ceux qui se battent contre la xénophobie et pour la « diversité ».

Vous êtes parvenu à transformer le vieux slogan « prolétaires de tous les pays, unissez-vous » en une maxime post-moderne : « actifs financiers de tous les pays, venez chez nous ». Sans distinction de race, de sexe ou de religion. Vous défendez ainsi une représentation ouverte du paradis (fiscal) sur terre. Même les « froggies » que nous sommes y ont leur place, moyennant un ticket d’entrée certes, mais aucun paradis n’est accessible sans effort.

Il fut un temps où Londres accueillait Voltaire (contraint à l’exil), Montesquieu (qui écrivit en 1728 « L’Angleterre est à présent le plus libre pays qui soit au monde »), Jules Vallès (en exil après sa participation à la Commune de Paris), Mallarmé et beaucoup d’autres. Quant à Victor Hugo, son exil dans les îles anglo-normandes est intervenu après le coup d’État de 1851 et non pour des raisons fiscales. Mais ces époques sont révolues, sauf je suppose pour quelques écrivains ou artistes à grand succès (commercial).

Je sais que nos compatriotes fortunés seront bien traités, notamment dans votre centre de rétention de luxe qu’est la City de Londres. Je sais que vous éviterez tout matraquage (fiscal), qu’ils auront toute liberté d’action sans obligation, et qu’ils pourront tirer avantage (financier) du malheur des peuples grec, espagnol ou de tout autre peuple ne payant pas son indispensable tribut à la City.

Je me permets toutefois de rectifier une partie de votre offre de services (financiers). Vous avez en effet déclaré : « Nous accueillerons plus d’entreprises françaises, qui paieront leurs impôts au Royaume-Uni. Ça paiera nos services publics et nos écoles ».

La dernière phrase me pose un problème. Ou bien vous les taxez suffisamment pour que cela finance vraiment vos services publics, ou bien vous les accueillez dans un authentique paradis (fiscal) et, dans ce cas, vous ne créerez guère de postes dans la santé ou dans l’éducation. C’est d’ailleurs ce qui s’est produit au cours des dernières années, n’est-il pas ?

Quoi qu’il en soit, votre sens de l’hospitalité – de type censitaire, voir ce billet de Christian Chavagneux - saute aux yeux. Mais mes concitoyens sont eux aussi très « hospitaliers » : ma propre région, le Nord-Pas-de-Calais, a accueilli chaque année dans ses services hospitaliers des centaines d’exilés médicaux britanniques. Ce phénomène est ancien. En 2002, un article de presse révélait ceci :

« Il faut le voir pour le croire : boitant, s’aidant de cannes et de béquilles, un groupe de sujets de Sa Majesté vont en France pour recevoir les soins que leur pays n’a pas pu leur donner… « C’est affreux d’aller se faire soigner à l’étranger, tout le monde est d’accord, explique Anne Cullingworth, 62 ans. Mais j’attends un nouveau genou depuis un an et demi et je devrais encore patienter jusqu’en juillet. … Anne va rester seize jours à Lille. Son opération va coûter au service de santé britannique 4 573 £ (30 000 F). Elle serait revenue à 6 707 £ (44 000 F) si elle avait été réalisée dans le service public anglais et 12 958 £ (85 000 F) dans une clinique privée… D’ici à la fin mars, les autorités sanitaires du sud-est de l’Angleterre enverront deux cents autres malades aux quatre coins de la France. »

Je serais très heureux de savoir comment ce phénomène a évolué, d’abord à l’époque de votre collègue Tony Blair (les choses s’étaient nettement améliorées, dit-on), puis sous les Conservateurs. Car ce que j’ai lu récemment sur la crise de votre NHS (National Health System) est très inquiétant (voir entre autres cet article du Guardian). Mais il me faut aussi admettre qu’après deux quinquennats de politiques conservatrices en France, notre système de santé, qui a beaucoup souffert, a vu fondre ses capacités à dérouler le tapis rouge à l’arrivée des « patients anglais ».

Notre hospitalité pour vos exilés n’est pas seulement hospitalière. Elle concerne aussi les jeunes Britanniques dont les taux d’exil volontaire sont les plus élevés des pays occidentaux. Dans un livre sur les inégalités que j’ai publié en 2006, j’écrivais ceci :

« En 2005, 360 000 Britanniques ont quitté leur pays, chiffre le plus élevé jamais enregistré (Le Monde du 21 février 2006), et, selon un rapport de la Banque Mondiale de 2005, un diplômé britannique sur six quitte la Grande-Bretagne pour aller travailler à l’étranger, taux le plus élevé parmi les pays occidentaux. Pourquoi quittent-ils leurs pays ? D’abord pour une meilleure qualité de vie. Ce n’est pas seulement le climat britannique qui est en cause, mais bien plutôt le climat social : la cherté de la vie, la criminalité, l’engorgement des transports, le manque de postes en médecine, etc. Autrement dit, bon nombre d’entre eux se « délocalisent » parce que les biens publics sont de mauvaise qualité et que la santé sociale se dégrade. ».

Cher David Cameron, pourriez-vous me dire si, depuis ces constats, les choses vont bien dans votre pays sur le plan de la santé sociale ? Si je me permets d’en douter, c’est que les données européennes montrent que le taux de pauvreté dans votre pays atteignait 17,1% en 2009 contre 13,5 % en France, 15,6 % en Allemagne (16,4 % dans l’UE à 27). Seriez-vous à la tête d’un Royaume désuni ?

Vous allez me dire que tout cela n’est pas bien grave tant qu’on a la santé financière, car à vos yeux l’avenir en dépend, avant tout autre critère. J’ai à nouveau de fortes craintes. Dans son livre incisif « C’est plus grave que ce qu’on vous dit… mais on peut s’en sortir », Pierre Larrouturou nous explique que « la dette privée (celle des ménages et des entreprises non financières) du Royaume-Uni dépasse les 230 % du PIB contre 130% en France ». Il poursuit : « si l’on ajoute la dette publique et surtout l’énorme dette du secteur financier, on dépasse 900 % du PIB » (source : Morgan Stanley, décembre 2011). Une bulle gigantesque qui pourrait engloutir votre système financier et votre économie nationale. Ceux de mes compatriotes que vous invitez à délocaliser leurs actifs savent-ils cela ?

Sincerely yours,
Jean Gadrey

Article publié initialement sur le site d'Alternatives Economiques http://alternatives-economiques.fr/blogs/gadrey/2012/06/22/lettre-a-david-cameron/

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20 mai 2012 7 20 /05 /mai /2012 08:21

AttacCe samedi 19 mai, plus de 25.000 personnes ont manifesté à Francfort face à la BCE, à l'appel de mouvements sociaux allemands, rejoints par des mouvements de toute l'Europe.

Malgré un dispositif sécuritaire disproportionné (avec près de 5000 policiers présents), et malgré l'interdiction et la répression des rassemblements pacifiques prévus les jeudi et vendredi, la manifestation a été une franche réussite : festiveet sans aucun débordement, elle a rassemblé de nombreux nombreux manifestants venus de plusieurs pays européens, dont plusieurs centaines de militants venus de France.

Les manifestants ont dénoncé les politiques d'austérité généralisée en Europe, et plus particulièrement les prétendus «sauvetages» négociés par la Troïka (La BCE, la Commission européenne et le FMI) qui mènent les pays surendettés à la banqueroute économique et sociale. Ils ont rejeté le pacte budgétaire, qui grave dans le marbre des traités ces politiques destructrices, et appelé à une réorientation radicale des politiques européennes.

Au lendemain de la défaite de Nicolas Sarkozy en France, et après le score élevé obtenu par la gauche anti-austérité en Grèce, cette mobilisation est le signe de la contestation grandissante en Allemagne et en Europe des politiques austéritaires promues par Angela Merkel. Il s'agit d'une étape dans la convergence des mouvements sociaux européens face aux politiques d'austérité et à l'hégémonie de la finance.

Attac France et le réseau des Attac d’Europe continueront à contribuer à cette convergence en jetant des ponts entre les mobilisations et les mouvements, pour promouvoir les vraies alternatives à la crise et permettre la construction d'une autre Europe, sociale, écologique et démocratique.

Attac France,
A Francfort le 19 mai 2012

 

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24 avril 2012 2 24 /04 /avril /2012 07:01

CAC.jpgLe nouveau traité européen  représente un véritable danger pour la démocratie et les droits sociaux en Europe. Le collectif pour un audit citoyen se mobilise !

Le 1er mars 2012, 25 (sur 27) chefs d’État et de gouvernement ont signé un nouveau traité, le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de l’Union économique et monétaire (TSCG), qui devrait entrer en vigueur au début de l’année 2013. 

Ce traité, dénommé «Pacte budgétaire», est présenté comme un remède à la crise par les gouvernements européens et la «Troïka» – la Commission européenne, la Banque centrale européenne (BCE) et le Fonds monétaire international (FMI). Sa recette est simple : l’austérité généralisée en Europe.

Nous aurions vécu au-dessus de nos moyens, et, désormais, pour «rassurer les marchés», il nous faudrait consentir à des mesures «douloureuses» : fermeture d’écoles, d’hôpitaux, suppression d’allocations sociales, remise en cause du droit du travail et «modération» des salaires…

Le nouveau traité comprend ainsi plusieurs outils pour contraindre durablement (et sans débat démocratique) les Etats à effectuer les réformes «nécessaires» : la «règle d’or», qui impose un quasi-équilibre budgétaire, ainsi qu’un arsenal punitif renforcé pour les pays «laxistes».

Le Pacte budgétaire dresse ainsi les contours d’une Europe technocratique qui écrase les peuples pour mieux rassurer les marchés. Le Collectif pour un audit citoyen de la dette vous propose ici une petite visite guidée des dispositifs prévus par ce nouveau traité.

  • Une règle d’or : l’austérité !

L’imposition de la «règle d’or» dans la législation nationale représente une des principales nouveautés du Pacte budgétaire. Celle-ci répond à une logique simple. Comme le Traité de Maastricht leur interdit d’emprunter à la Banque centrale européenne, les États en déficit doivent chaque année emprunter sur les marchés en créant de nouvelles dettes. Interdire les déficits publics serait alors un moyen simple d’empêcher qu’un Etat s’endette davantage et représenterait donc un «frein» à la dette.

Cette nouvelle «règle d’équilibre budgétaire» exige  que les budgets soient en équilibre ou en excédent. Il s’agit plus précisément de réduire le «déficit structurel» des États, c’est-à-dire le déficit calculé en éliminant la partie «conjoncturelle», liée à une chute de recettes lors d’une récession ou à un surcroît de recettes lors d’une année de croissance exceptionnellement forte. Un déficit structurel trop élevé serait un signe de déséquilibre durable dans les finances publiques.

Selon la Commission européenne, c’est ce type de déséquilibre qui serait à l’origine de la crise de la dette : les Etats dépenseraient trop par rapport à ce qu’ils «gagnent». La crise de la dette révélerait donc une sorte de faute morale que les Etats n’auraient jusque là jamais admise. Cette faute devrait donc désormais être sévèrement sanctionnée.

Le Pacte budgétaire impose ainsi aux États signataires d’engager des réformes immédiates pour réduire leur déficit structurel sous la barre de 0,5 %. Avec, pour les États en dehors des clous, des amendes significatives.

A priori, il existe de nombreuses manières de réduire les déficits : augmenter les recettes, en augmentant les impôts ou encore en  stimulant  l’activité économique, ou réduire les dépenses, c’est-à-dire couper dans les dépenses sociales, les services publics et les effectifs et salaires de la fonction publique.

Pourtant, les recommandations de la Commission sont claires : la «meilleure» manière de réduire les déficits consiste à couper dans les dépenses sociales. Ce n’est pas seulement la Commission qui le dit : les règles, les procédures actuelles, les textes européens et le Pacte budgétaire lui-même mettent l’accent sur la réduction des dépenses, comme s’il s’agissait de la seule méthode envisageable.

Le message est donc clair : pour réduire les déficits, il faut généraliser les «cures d’austérité» en Europe.

Cela a été confirmé avec l’adoption par les gouvernements européens du Pacte pour l’euro en mars 2011, qui stipule que l’«équilibre des finances publiques» présuppose des coupes drastiques dans les retraites, les dépenses de santé et allocations sociales. La concurrence fiscale « libre et non faussée » qui règne entre les États européens les pousse de toute façon à réduire impôts et cotisations pour attirer les capitaux.

L’indicateur du «déficit structurel», issu de calculs complexes, donne aux saignées budgétaires l’apparence d’une «rigueur» scientifique. Pourtant, ses méthodes de calcul sont de pures constructions statistiques. Aucune méthode existante ne fait consensus au plan international, ni même à l’échelle européenne. Le FMI, l’OCDE, la Banque centrale européenne et la Commission n’ont pas tous la même approche et parviennent des résultats différents.

La méthode utilisée jouera pourtant un rôle crucial. Un État peut se retrouver loin d’un côté ou de l’autre de la barre des 0,5% selon les méthodes de calcul.

  • La règle de plomb de l’austérité

La méthode de calcul du déficit structurel comprend dans ses hypothèses des choix résolument politiques : les dépenses de santé ou d’éducation sont-elles des investissements dans l’avenir, ou de simples dépenses de fonctionnement à sabrer ? Les dépenses d’investissement – notamment en recherche et développement, ou bien pour financer des projets d’avenir comme la transition écologique doivent-ils être inclus dans le calcul du déficit – et donc réduits à tout prix ?

Malgré la portée de ces choix pour l’avenir de nos sociétés, ce sera la Commission, instance non élue, qui décidera  des principes communs de calcul des déficits structurels. Les États devront s’aligner sur ces «bonnes pratiques», sous le contrôle de la Cour de justice européenne.

Or, dans les calculs de la Commission, les seules exemptions aux dépenses concernent celles associées à des catastrophes majeures, des actions militaires ou des décisions des institutions européennes  (comme par exemple des amendes infligées aux États membres !).

En fait, le calcul du « déficit structurel » est si arbitraire qu’il ne peut en aucun cas être utilisé pour fonder une politique économique. Dans le cadre du Pacte budgétaire, sa fonction est en réalité  de jeter l’opprobre sur les dépenses publiques  et de pousser les États à toujours plus d’austérité.

  • Combien ça va coûter ?

Concrètement, combien va coûter la réduction des déficits ? Pour la France, le déficit  réel  était prévu à 5,7 % du PIB[5] en 2011, pour un déficit structurel calculé à 3,8 % du PIB. En application du Pacte budgétaire, il faudrait donc réduire le déficit de 3,3 points… soit 66 milliards d’euros !

En comparaison, la réforme des retraites aurait permis de réduire les dépenses publiques à hauteur de 7 milliards en 2012 selon le projet de budget du gouvernement. Il s’agit donc approximativement d’effectuer l’équivalent d’une dizaine de réformes des retraites.

Le temps dévolu aux gouvernements pour s’ajuster à l’objectif de 0,5 % n’est pas encore clairement défini dans les propositions de la Commission. Dans le volet préventif de l’actuel Pacte de stabilité, les États membres sont tenus de réduire leur déficit au rythme de 0,5 point de PIB par an… soit pour la France un rythme de 10 milliards d’euros par an !

Dans leurs efforts pour réduire les déficits, les signataires auront exceptionnellement la possibilité d’accepter un déficit supérieur à 0,5%, dans le cas où ils feraient face à une récession , à condition que cela ne mette pas en danger l’atteinte d’un « équilibre budgétaire à moyen terme ».

Cette exception pourrait néanmoins ne jamais entrer en vigueur… Par ailleurs, aucune limite temporelle n’est prévue à cette «règle de plomb». C’est donc ni plus ni moins que l’austérité à perpétuité qui est promise à l’Europe!

  • Des dégâts économiques et sociaux considérables

Les mesures d’austérité sont à l’origine de dommages sociaux considérables. Cela n’effraie pas du tout la Commission et les gouvernements européens. Après tout, il s’agit là, ni plus ni moins, que de radicaliser les mesures de «modernisation» de l’Etat, comme en témoignent les coupes budgétaires mises en œuvre dans le cadre des plans d’austérité appliqués depuis 2009 :

  • dans les salaires et effectifs de la fonction publique
  • dans la protection sociale, chômage, logement…
  • dans les financements des collectivités locales
  • dans les services publics
  • dans les retraites, via le recul de l’âge légal [1].

Ces mesures sont fondamentalement injustes, car elles touchent en priorité les populations les plus précaires, les femmes[2], les jeunes, mais aussi les classes populaires ainsi que les classes moyennes.

Elles sont aussi absurdes économiquement. En effet, elles créent un cercle destructeur : la baisse des revenus (pertes d’allocations, hausse des prix dans les services publics) contribue à diminuer la consommation, puis l’activité. Elle accentue la récession qui va davantage peser sur les comptes publics – avec pour conséquence une augmentation du déficit public que ces mesures étaient censées résoudre. La règle de plomb de l’austérité ne freine pas l’endettement… elle l’accélère !

Les politiques d’austérité ont ainsi littéralement laminé l’économie grecque. Le nouveau plan adopté en février dernier est une étape supplémentaire : baisse de 22% du salaire minimum, ramené à 586 euros bruts sur 14 mois, suppression dans l’année de 15 000 emplois publics, nouvelles coupes dans les pensions de retraite. Loin de jeter les bases d’une sortie de crise, les prétendues «cures» imposées par la Troïka entretiennent un cercle vicieux de récession et de chômage.

  • Une «compétitivité» qui plombe toute l’Europe…

En fait, le paradigme du Pacte budgétaire s’inspire de la politique économique menée par l’Allemagne ces dernières années. La «règle d’or» budgétaire y a déjà été adoptée pour contrôler le recours des administrations publiques à l’endettement. Le gouvernement d’Angela Merkel a récemment inscrit dans la Constitution une règle pour obliger les gouvernements futurs à rester en-dessous d’un déficit structurel de 0,35%.

Avec le Pacte budgétaire, c’est le modèle conservateur allemand dans son ensemble qui est imposé comme l’exemple à suivre. Pourtant, celui-ci ne peut en rien servir de modèle pour l’Europe. Ce modèle repose sur une recherche de performance commerciale à tout prix («compétitivité»), à travers une baisse des salaires réels, des attaques sur les droits sociaux (notamment sur les allocations chômage) en parallèle avec des avantages fiscaux pour les grandes entreprises, des privatisations…

L’explosion des excédents commerciaux allemands provoque mécaniquement celle des déficits commerciaux des partenaires, qui n’ont d’autre choix que de s’endetter… ou d’imposer eux-mêmes une «dévaluation interne» par une baisse massive des salaires et des budgets sociaux. Mais cette politique  pèse sur leur demande interne et donc sur les exportations allemandes.

L’Allemagne risque fort elle-même d’entrer en récession en 2012 car, à une demande interne affaiblie depuis des années, vient maintenant se combiner un ralentissement de ses exportations en Europe dû aux conséquences des politiques d’austérité qu’elle a promues. Le modèle allemand n’est pas soutenable pour les autres pays européens ni pour l’Allemagne elle-même.

C’est pourtant cette spirale destructrice de dumping social et fiscal à l’échelle de l’Europe que le Pacte budgétaire institutionnalise.

L’impossible transition sociale et écologique

Le carcan d’austérité de la «règle d’or» ne va pas seulement obliger les gouvernements à mettre en œuvre des coupes sévères dans les dépenses sociales: il va par ailleurs priver les gouvernements de leviers économiques d’une importance considérable en période de crise. Il sera désormais impossible de  mettre en place des politiques budgétaires ambitieuses et des investissements publics pour initier la transition écologique et relancer l’emploi.

Après la crise de 1929, Roosevelt avait proposé un « New Deal » avec des investissements publics importants pour relancer l’économie. Dans l’Union européenne du Pacte budgétaire, ce programme aurait été l’objet de sanctions très lourdes qui l’auraient rendu impossible. S’imposer un quasi-équilibre budgétaire, cela signifie que les investissements de long terme seront financés par les recettes courantes.Or ces investissements seront utilisés des décennies durant par plusieurs générations, il est donc totalement absurde qu’elles soient financées par les recettes du moment.

Si cette règle devait être respectée, elle entrainerait l’impossibilité, de fait, d’investir pour l’avenir, alors même que les urgences sociales et écologiques supposent des investissements massifs. Pour sortir de la crise, il existe des moyens bien plus efficaces et plus justes, et qui ne sacrifient pas l’avenir ! (voir ci-après)

Mirages de l’investissement privé

Avec le Pacte budgétaire, les institutions et les gouvernements européens acceptent de se lier les mains, et de tirer une croix sur toute politique budgétaire ambitieuse d’investissements publics. Ils disent vouloir favoriser les conditions d’une relance de la croissance par l’investissement privé et la «compétitivité».

Cette prétendue «politique de croissance» justifie un nouvel approfondissement de l’agenda néolibéral, avec la privatisation des services et vente des biens publics (la gestion publique étant moins «rentable»), la flexibilisation du marché du travail (licenciements facilités, négociation collective éliminée pour faciliter la baisse des salaires) et de nouvelles taxes sur la consommation, la TVA, l’essence… qui contrastent avec les cadeaux fiscaux pour les riches et les grandes entreprises.

Ces mesures attaquent les droits sociaux, la négociation collective, et contribuent à une diminution des revenus de la majorité de la population. Appliquées à l’échelle européenne, elles favoriseront elles aussi la récession. Dès lors, malgré tous ces «efforts», les investisseurs privés préfèreront se tourner vers des placements plus rentables… comme la spéculation sur les dettes publiques !

 

  • Punitions contre la démocratie

Au fond ce nouveau Traité  semble jusqu’ici ne rien faire d’autre que de radicaliser les objectifs du Pacte de stabilité et de croissance, qui imposait aux États de ne pas dépasser un déficit de 3 %.

Le Pacte budgétaire reprend par ailleurs en grande partie les mesures développées dans le cadre du paquet européen de gouvernance économique déjà adopté par l’Union européenne en 2011 : contrôle a priori des budgets par la Commission, avec à la clé des sanctions possibles pour les gouvernements qui ne se soumettraient pas à l’impératif de réduire la dette.

Pourtant, le Pacte budgétaire représente une véritable révolution : non seulement parce qu’il impose aux États l’objectif de l’équilibre budgétaire, mais aussi dans les moyens nouveaux qui sont donnés aux institutions européennes pour faire respecter ses mesures.

L’arsenal punitif est considérablement renforcé et des pouvoirs exorbitants sont confiés à la Commission, mais aussi à la Cour de justice européenne.

  • Des sanctions automatiques

Les amendes infligées aux pays surendettés ou en déficit seront décidées sur proposition de la Commission européenne au Conseil européen, selon un principe dit «de majorité inversée». C’est-à-dire que pour bloquer une procédure, une majorité qualifiée des États membres sera  désormais  nécessaire… Les punitions pourront donc être infligées de manière quasi automatique sur proposition de la Commission européenne. Pis encore : le pays «accusé» n’aura pas le droit de participer au vote !

Par ailleurs, si un État membre considère qu’un autre État membre n’a pas adopté de législation suffisamment contraignante pour mettre en œuvre les règles du traité, il peut porter plainte auprès de la Cour de justice européenne. Celle-ci pourra à ce titre imposer des amendes à hauteur de 0,1 % du PIB (ce qui représente pour la France autour de 2 milliards d’euros). Ce traité n’encourage donc en rien l’esprit de coopération et d’entraide entre pays européens !

  • Tout sauf le référendum !

En ce qui concerne le «frein à la dette», il est prévu que les gouvernements mettent eux-mêmes en œuvre des mécanismes de correction automatique d’un déficit «excessif» au sein même de leur  législation nationale.

L’inscription dans la Constitution n’est pas obligatoire. Le texte stipule en effet que les États membres doivent adopter des « dispositions à caractère contraignant, de préférence constitutionnelles, ou bien avec la garantie d’une application et d’une adhésion totale lors du processus d’adoption du budget national».
Des dispositions doivent cependant être prises pour que le frein à la dette ne puisse pas être remis en cause. Comme l’indiquait Angela Merkel : «Le frein à la dette va être contraignant et s’appliquer de manière permanente. Les règles ne doivent en aucun cas pouvoir être changées par une nouvelle majorité parlementaire».

Pour ce faire, des instances indépendantes pourraient être mises en place au niveau national, probablement composées d’experts et d’économistes, afin de veiller à l’application de la discipline budgétaire.

Pourquoi  un montage institutionnel aussi complexe et pour l’instant imprécis ? En fait la réponse est simple :  dans certains pays, une modification de la Constitution nécessite un référendum. Consulter le peuple? Un scénario à éviter à tout prix pour les promoteurs du Pacte budgétaire. D’où ces palinodies à propos d’une «règle permanente, quasi constitutionnelle, mais en-dehors de la constitution». Pour nos élites européennes, la démocratie, voilà l’ennemi.

  • Couler les peuples pour sauver les banques

Le «traité d’austérité» resserre d’un cran les vis d’un édifice institutionnel complexe, qui fait de l’austérité l’alpha et l’oméga des politiques économiques européennes. Il s’apprête à remettre en cause de manière généralisée les droits sociaux et la protection sociale en Europe.

Une remise en cause qui est déjà largement avancée dans les pays surendettés comme la Grèce, le Portugal ou l’Irlande, qui ont fait l’objet d’interventions de la Troïka. Le Pacte budgétaire s’articule en fait avec le Mécanisme européen de stabilité (MES) pour permettre de garantir de telles interventions.

Le MES a  pour vocation de généraliser les purges menées par la Troïka dans ces pays, avec les conséquences que l’on connaît (récession, chômage, misère…). Ce mécanisme prolonge en effet le Fonds européen de stabilité financière (FESF) qui a permis de mettre en œuvre les différents « sauvetages » européens.

Ce fonds avait été mis en place en urgence : devant le risque d’un défaut de la Grèce, c’est-à-dire d’une cessation brutale du paiement des intérêts de la dette grecque aux banques, les membres de la zone euro s’étaient accordés pour violer le Traité de Maastricht (repris par les traités ultérieurs), qui interdisait toute  «solidarité financière» entre États européens.

Ils se sont mis d’accord pour emprunter les sommes nécessaires et les fournir à la Grèce plutôt que de confier à la Banque centrale européenne  un rôle – lui aussi interdit par Maastricht – de prêteur en dernier ressort. Il ne s’agissait pourtant pas d’une «solidarité» à l’égard du peuple grec : les «plans de sauvetage» successifs ont en effet permis de recapitaliser les banques nationales et de racheter des volumes importants d’obligations aux créanciers des pays en difficulté, évitant ainsi de lourdes pertes aux banques européennes.  Pour permettre ce sauvetage des banques, le peuple grec devait payer : des plans d’austérité drastiques ont ainsi été mis en œuvre.

Le MES est bâti comme un FMI européen. Non seulement il applique les mêmes préceptes, mais son fonctionnement est par ailleurs calqué sur celui du FMI. Il ne rend de comptes à aucun parlement, aucun tribunal, seulement à un Conseil de «gouverneurs» représentant ses «actionnaires» (c’est-à-dire les États membres, à hauteur de leur contribution).

  • La spirale destructrice de l’austérité généralisée

Les «plans de sauvetage» successifs appliqués en Grèce permettent surtout de sauver le flux des intérêts qui saignent l’économie et alimentent les créanciers. Mais le peuple grec n’est pas le seul à faire les frais de la «solidarité européenne».

Les membres du MES seront en effet amenés, pour financer les prochains « sauvetages », à emprunter des sommes considérables sur les marchés financiers. La France s’est ainsi engagée à fournir jusqu’à 142 milliards d’euros, pour assurer les plus-values des créanciers.

Cela ne fera qu’accroître la pression sur les gouvernements afin qu’ils donnent des « garanties » de rigueur budgétaire aux créanciers et aux agences de notation. Il y a fort à parier que les interventions futures du MES seront aussi conditionnées à la mise en place d’une austérité accrue… pour les «sauveteurs». Une austérité «garantie» par l’adoption du Pacte budgétaire.

Alors que les peuples européens seront appelés à payer le coût des prétendus sauvetages de la Troïka, les emprunts du MES permettront aux banques de se rémunérer grassement. Elles pourront en effet emprunter à moindre frais à la Banque centrale européenne, et sans contreparties.

C’est ainsi que fin 2011 et début 2012, la BCE a inondé les banques privées européennes avec des prêts se montant à 1000 milliards d’euros sur trois ans, au taux amical de 1%, sommes dont une partie est en train d’être reprêtée aux États qui payent quant à eux des taux d’intérêt de 2 à 8 fois plus élevés…

Le MES met à la poubelle l’article du traité de Maastricht qui interdisait les aides entre États mais ne résout en rien le vice de fabrication de la zone euro : sa dépendance à l’égard des marchés financiers. Au contraire, il l’accentue.

C’est un véritable mécanisme d’instabilité permanent, qui s’apprête à plonger, par entraînement, l’Europe toute entière dans un cercle destructeur de politiques d’austérité généralisées et de récession sans fin.

Que retenir ? Plusieurs constats clairs :

  • Le Pacte budgétaire ne va pas sauver l’Europe, mais l’enfoncer davantage dans la crise économique, sociale, écologique et démocratique.
  • Il va approfondir l’austérité généralisée, en forçant les gouvernements à respecter un programme économique absurde qui mène à la récession.
  • Il est toxique pour la démocratie en imposant des mécanismes technocratiques de surveillance et de sanction des budgets nationaux.

Le Pacte budgétaire et le MES sont à l’image de l’Europe voulue par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, foulant au pied la démocratie et les peuples.

Ils mettent en place une mécanique technocratique, antidémocratique et antisociale pour mieux sauver les intérêts des plus riches et des banques. C’est ce « sauvetage » permanent qui entraîne les pays européens dans une surenchère de casse sociale et démocratique.

Pour la première fois de son existence, la Confédération européenne des syndicats a marqué sa désapprobation en s’opposant au nouveau traité européen. Jürgen Habermas, le grand philosophe allemand qui avait soutenu le Traité Constitutionnel Européen, estime aujourd’hui que les réformes européennes ouvrent une période de « domination post-démocratique ».

La violence des politiques entreprises par la Troïka dans les pays surendettés, la radicalisation de l’agenda néolibéral et des reculs sociaux changent donc la donne. Un large front de forces sociales peut émerger pour imposer une rupture avec cette logique néolibérale radicalisée.

Cette rupture doit reposer sur deux principes : une politique économique alternative, une rénovation complète de la démocratie en Europe.

  • Sortir l’Europe de la mainmise des marchés

Une véritable solidarité européenne : avec une intervention directe de la BCE pour dissuader la spéculation et sortir de l’asphyxie  les économies des pays surendettés par de massifs investissements publics. Dans le même temps, des audits de la dette doivent aboutir à des restructurations importantes, avec participation du secteur privé.

Sortir le financement public des marchés financiers : les États doivent pouvoir emprunter directement à la Banque centrale européenne sans passer par les banques privées; des mesures de relance publique et d’investissements massifs sont urgentes pour satisfaire les besoins sociaux, renforcer la convergence vers le haut des économies européennes et amorcer la transition écologique.

Mettre les banques au service de la société : Dissocier clairement les activités de banques de détail de celles d’investissement, de financement et de spéculation, mise sous contrôle public et démocratique du secteur des banques et assurances dans le cadre d’un authentique service public bancaire.

Désarmer les marchés financiers : Les mécanismes spéculatifs, comme le trading à haute fréquence, la vente à découvert, les marchés de gré à gré, les CDS et la spéculation sur les produits dérivés doivent être interdits. Une taxe  ambitieuse sur les transactions financières doit voir le jour dans l’Union européenne ou au moins dans la zone euro.

Lancer une révolution fiscale à l’échelle européenne, en taxant les riches et les profits et en mettant un terme à l’évasion fiscale et aux paradis fiscaux pour redonner des marges de manœuvre à l’action publique

  • Une rénovation démocratique complète

Dans un premier temps, cela suppose de rejeter le Pacte budgétaire par des mobilisations européennes et dans les différents États. Avec les autres peuples européens nous voulons imposer dans tous les pays un véritable débat démocratique autour des enjeux de la dette publique, des alternatives à l’austérité et à ce nouveau Traité.

Dans un second temps, il faut engager un processus démocratique d’élaboration d’un nouveau traité européen avec tous les pays voulant s’engager dans cette voie, pour refonder l’Europe sur des bases de solidarité et de démocratie. Faute de quoi l’Union s’enfoncera dans la récession, le chômage, le racisme et la xénophobie, et son éclatement deviendra inéluctable.

Notes

[1] Voir le livre blanc de la Commission européenne du 16 février 2012 Une stratégie pour des retraites adéquates  sûres et viables COM(2012) 55 final.

[2] Voir le rapport «Femmes et austérité» sur le site du collectif.

Ce document doit beaucoup à l’article «10 choses que vous devez savoir sur le Pacte budgétaire» par le Corporate Europe Observatory (en ligne: http://dessousdebruxelles.ellynn.fr/spip.php?article175).

www.audit-citoyen.org
gro.neyotic-tidua@tcatnoc

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23 avril 2012 1 23 /04 /avril /2012 07:11

CAC

 

Le Mécanisme Européen de Stabilité (MES) et Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) décryptés par le Front de gauche (CN-PCF) Ce contenu a été publié le Clips par Collectif pour un audit citoyen.

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22 avril 2012 7 22 /04 /avril /2012 10:57

Le MondeTout ce dont le mal a besoin pour triompher, c'est du silence des gens honnêtes ", écrit le philosophe du XVIIIe siècle Edmund Burke. La France élit son président... et aucun des candidats ne pense ne serait-ce qu'à mentionner le massacre quotidien de la faim. La destruction annuelle de dizaines de millions d'êtres humains par la faim est le scandale de notre siècle. Toutes les cinq secondes, un enfant âgé de moins de 10 ans meurt de faim, 37 000 personnes meurent de faim tous les jours et près de 1 milliard - sur 7 milliards - sont mutilées par la sous-alimentation permanente... Cela sur une planète qui regorge de richesses !

Le même rapport sur l'insécurité alimentaire dans le monde de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) qui donne les chiffres des victimes dit aussi que l'agriculture mondiale, au stade actuel de ses forces de production, pourrait nourrir normalement (2 200 calories pour un individu adulte par jour) 12 milliards d'êtres humains.

Au seuil de ce nouveau millénaire, il n'existe donc aucune fatalité, aucun manque objectif. Un enfant qui meurt de faim est assassiné. Le problème des affamés n'est pas la disponibilité générale des aliments sur la terre, mais leur propre accès à ces aliments, essentiellement leur manque de moyens monétaires pour les acquérir. Le meurtre collectif par la faim de millions d'êtres humains a, avant tout, des causes structurelles.

Une dizaine de sociétés transcontinentales privées contrôlent 85 % du marché alimentaire mondial. Elles sont actives en Bourse, fixent les prix, contrôlent les stocks et condamnent les pauvres puisque seuls ceux qui ont de l'argent ont accès à la nourriture. En 2011, par exemple, Cargill a contrôlé plus de 26 % du blé commercialisé dans le monde. Depuis trois ans, après l'effondrement des marchés financiers, les spéculateurs se sont rués sur les matières premières agricoles, non seulement pour les vendre comme aliments, mais aussi pour transformer des millions de tonnes de plantes nourricières en agrocarburants.

La volatilité des prix est devenue extrême : en deux ans, le maïs a connu des pics d'augmentation de 63 % et le riz philippin de 58 % ; entre 2010 et 2011, le prix de la tonne de blé meunier a doublé. Les spéculateurs sont deux fois responsables. Des millions de pauvres, qui consacrent la totalité de leur maigre budget à se nourrir, sont devenus insolvables. Et le Programme alimentaire mondial, qui a perdu la moitié de son budget annuel parce que les Etats donateurs ont dû renflouer leurs banques, ne peut plus acheter assez de nourriture pour l'aide d'urgence en cas de famine : comme dans la Corne de l'Afrique, où les fonctionnaires de l'ONU refusent chaque jour l'entrée d'un des dix-sept camps installés dans la région à des familles réfugiées de la faim.

D'autres causes de la faim structurelle sont le dumping agricole pratiqué par l'Union européenne, qui déverse sur les marchés africains ses produits agricoles subventionnés aux dépens des produits locaux ; l'endettement de nombre de pays pauvres, qui empêche leurs gouvernements d'effectuer l'investissement nécessaire dans leur agriculture vivrière - irrigation, engrais, semences - ; l'accaparement des terres arables par les fonds spéculatifs, fonds souverains et sociétés transcontinentales (41 millions d'hectares acquis en Afrique en 2011, selon la Banque mondiale), etc.

La France est la cinquième puissance économique du monde. Son histoire, son rayonnement culturel lui confèrent un prestige immense. Au Fonds monétaire international, à la Banque mondiale, à l'Organisation mondiale du commerce, au sein du G20, sa voix est écoutée. Il existe des mesures concrètes que le nouveau président français pourra imposer : interdire la spéculation boursière sur les produits alimentaires de base - riz, blé, maïs ; faire cesser l'accaparement en Afrique de terres arables par les sociétés multinationales d'origine française ; empêcher le dumping agricole ; obtenir l'annulation de la dette extérieure des pays les plus pauvres ; en finir avec les agrocarburants fabriqués à partir de plantes nourricières...

La solidarité internationale entre la France et les peuples de l'hémisphère Sud est absente du débat électoral. Le silence des candidats et candidates de gauche sur ce point relève non seulement de la faute morale, mais encore de l'erreur tactique. Pays de la Révolution, la France a une grande tradition de combat pour la solidarité transnationale entre les peuples. Nulle part ailleurs en Europe, il n'existe une densité aussi impressionnante de mouvements sociaux, d'ONG luttant pour la justice sociale planétaire. Ne pas mobiliser cette solidarité, ne pas faire appel à ces forces sociales puissantes, constitue - notamment pour les candidats de gauche - une incompréhensible erreur.

Tribune de Jean Ziegler par dans le Monde du 21 avril 2012

J.Ziegler.jpgJean Ziegler, né Hans Ziegler, le 19 avril 1934 à Thoune dans le canton de Berne en Suisse, est un homme politique et sociologue suisse. Il a été rapporteur spécial auprès de l’ONU sur la question du droit à l’alimentation dans le monde. Il est l’auteur de nombreux ouvrages dans lesquels il analyse notamment cette question, et est également connu pour cette phrase : « l'agriculture mondiale peut aujourd'hui nourrir 12 milliards de personnes [...] donc les enfants qui meurent de faim sont assassinés. »

Son père était président du tribunal de Thoune et colonel d'artillerie. Jean Ziegler a un doctorat en droit et un en sociologie2.

Dans le livre Jean Ziegler parle aux arabes, écrit en 2003 par Riadh Sidaoui, l'auteur parle de la première fois où Ziegler a rencontré Che Guevara quand il s'est rendu à Genève à la tête de la délégation politique, à l'âge de 35 ans. Jean Ziegler est allé le voir à l'hôtel et lui a demandé de pouvoir l'accompagner à Cuba pour participer aux guerres contre l'hégémonie américaine et les dictatures en Amérique latine... Alors Che Guevara lui aurait dit : « Tu es né ici... alors c'est ici que tu devras combattre le monstre... ce qui est bénéfique pour vous et pour nous "... Collaborateur à la revue Afrique-Asie dans les année 1970 et 1980, il défend les interventions cubaines en Afrique.

Jean Ziegler est le rapporteur spécial pour le droit à l'alimentation du Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations unies de 2000 à 2008, poste auquel lui succède Olivier De Schutter. Il est actuellement membre du comité consultatif du Conseil des droits de l'homme des Nations unies.

Il est professeur de sociologie à l'université de Genève jusqu'en 2002 et à l'université de la Sorbonne à Paris. Il publie aussi de nombreux livres. Il est conseiller municipal (socialiste) de la ville de Genève de 1963 à 19673. Il est membre du parlement fédéral suisse (canton de Genève) du 4 décembre 1967 au 27 novembre 1983 et du 30 novembre 1987 au 5 décembre 1999 (parti socialiste) 4. Il est le premier dirigeant de la communauté d'Emmaüs genevoise. Il rencontre l'abbé Pierre à Paris en 1952.

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12 avril 2012 4 12 /04 /avril /2012 09:18

AttacUne délégation Attac France va se rendre au sommet des peuples de Rio du 14 au 24 juin 2012.
Les enjeux écologiques, économiques, géo-politiques qui se jouent à Rio sont énormes  et très engageants pour plusieurs décennies au détriment des peuples du monde entier.
Des délégué(e)s d'autres Attac du monde (Allemagne, Autriche, Togo, Argentine ...) seront présents également.
Il est essentiel qu'Attac France puisse participer aux différents travaux qui s'y tiendront afin d'en rendre compte à l'ensemble des adhérents et de donner une visibilité à notre association. Une souscription a été lancée pour faciliter le déplacement d'adhérents actifs qui souhaitent s'impliquer dans la mobilisation avant Rio et dans l'animation des campagnes que la commission écologie société portera après Rio.
Une liste d'échanges mail se met en place pour le travail de préparation et un rendez-vous est prévu le 11 mai à 18h au siège d'Attac avec tous les membres de la délégation.
Aussi il est important que ceux et celles qui souhaiteraient faire partie de la délégation le signalent assez rapidement, afin que nous puissions évaluer quel % de financement pourra être pris en charge.
La maîtrise d'une langue brésilien, espagnol ou anglais est fortement recommandée.
Merci d'envoyer dès possible vos souhaits  à jeanne@attac.org.

Attac France,
Paris, le 6 avril 2012

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1 avril 2012 7 01 /04 /avril /2012 10:30

AttacQuatre candidats de gauche ont répondu à Attac sur la ratification du nouveau traité européen, le « Pacte budgétaire » qui veut engager l'Europe dans l'austérité pour des décennies. Alors que Nicolas Sarkozy prétend que ce traité serait « trop compliqué » pour faire l'objet d'un référendum, François Hollande a refusé de nous répondre. Exigeons de ces candidats qu'ils acceptent et organisent le débat ! Nous invitons tous les citoyens à leur faire cette demande par courriel en vous rendant sur cette page.


Comment inverser la dérive antidémocratique des institutions politiques, en France et en Europe ? Comment redonner le pouvoir aux peuples pour qu'ils puissent reprendre en main leur destin commun ? Après son questionnement sur la finance et les banques, Attac a interpellé les candidats à l'élection présidentielle pour connaître leurs propositions sur la démocratie. Nous leur demandions en particulier s'ils comptaient engager un vaste débat démocratique sur l'avenir de l'Europe en décidant de soumettre à référendum la ratification du Traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance de la zone euro (dit « Pacte budgétaire »).

Quatre candidats nous ont répondu, et nous les en remercions. Nathalie Arthaud ne se prononce pas concernant un référendum sur le Pacte budgétaire. Eva Joly s'y déclare « à titre personnel » défavorable pour ne pas « renforcer les anti-européens ». Mais n'est-ce pas plutôt une ratification de ce Pacte désastreux par le Parlement sans débat avec la société qui renforcerait les « anti-européens » ? Jean-Luc Mélenchon « s’engage s’il est élu à soumettre à référendum la ratification de ce Pacte et à faire campagne pour son refus ». Philippe Poutou affirme que « le précédent de Lionel Jospin en 1997 qui, malgré ses déclarations pré-électorales, n’a pas voulu imposer une renégociation du Pacte de stabilité, montre qu’il faudra une campagne massive pour imposer ce référendum ».

Les candidats de droite ne nous ont pas répondu: c'est regrettable pour la qualité du débat démocratique de cette élection présidentielle mais cela ne nous surprend pas. Nicolas Sarkozy en particulier développe dans cette campagne une conception autoritaire et démagogique de la démocratie plébiscitaire, qui consiste à utiliser le mécanisme référendaire contre le peuple. Il s’est dit disposé à organiser des référendums contre les droits des chômeurs et des étrangers, mais pas sur le Pacte budgétaire, un sujet selon lui « trop compliqué » !

En revanche le refus de François Hollande de répondre à nos questions est incompréhensible. Certes il a déjà annoncé au Guardian qu'il ne voulait pas d'un référendum sur le Pacte budgétaire. Mais s'il refuse le débat avant l'élection et qu'il veut l'évacuer après, le « changement » qu'il annonce risque d'être très limité.

Le Pacte budgétaire, signé pour la France par Nicolas Sarkozy le 2 mars dernier, doit être ratifié avant la fin 2012. Il obligera les États signataires à réduire à marche forcée leurs déficits, imposant des sanctions automatiques aux contrevenants. François Hollande l'a critiqué à juste titre pour son caractère purement disciplinaire et punitif. Il s'est engagé à le renégocier.

Nous ne pensons pas qu'on puisse amender sérieusement ce traité, dont la logique fondamentale est d'imposer l'austérité pour rassurer les marchés. Les autres chefs d' État et de gouvernements européens, à commencer par Angela Merkel, ont déjà fait savoir qu'il n'y avait pour eux plus rien à négocier. En cas d'élection de François Hollande, les marchés financiers exigeront de sa part une ratification rapide, en provoquant sans doute même une hausse des taux d'intérêt sur les emprunts émis par la France.

Dans tous les cas ce n'est qu'en menant un vaste débat démocratique sur la construction européenne, et en s'appuyant sur une mobilisation des citoyens en France et en Europe, qu'on pourra faire reculer le rouleau compresseur de l'austérité et remettre l'Europe sur de bons rails.

Nous demandons donc à Nicolas Sarkozy et François Hollande de s'engager à organiser un débat démocratique conclu par un référendum pour ou contre la ratification du Pacte budgétaire, renégocié ou non. Nous invitons tous les citoyens à leur faire cette demande par courriel en vous rendant sur cette page.

En tout état de cause, si le président élu en mai prochain refusait d'engager le débat démocratique nécessaire sur la ratification de ce nouveau traité, nous proposerions l'organisation par la société civile elle-même d'un référendum d'initiative citoyenne contre le Pacte budgétaire et pour un nouveau traité de refondation européenne. Pour que des millions de citoyens aient l'occasion de s'emparer du débat, dont nous n'accepterons pas qu’il soit esquivé.

Attac France,
28 mars 2012

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28 février 2012 2 28 /02 /février /2012 15:34

AttacLe projet de Mécanisme européen de stabilité (MES), sur lequel le Sénat doit se prononcer mardi 28 février, s’apprête à institutionnaliser les méthodes employées par la Troïka dans les pays surendettés, avec les résultats catastrophiques que l’on connaît. Cette pseudo « solidarité » doit être dénoncée. Attac invite les citoyens à interpeller leurs sénateurs en leur envoyant la lettre type ci-jointe (une liste de contact des sénateurs y est incluse, elle est aussi disponible en cliquant ici).

 La mobilisation contre le MES n’est cependant qu’un début. Le MES s’insère en effet dans la mécanique du Pacte budgétaire, qui sera signé au Sommet européen du 1er et 2 mars. Ce nouveau traité impose une véritable camisole de force néolibérale via la mise en place de dispositifs de contrôle budgétaire, et de sanctions pour les « mauvais élèves » de l’austérité. Le traité impose par ailleurs l’insertion de « règles d’équilibre budgétaire » dans les législations nationales.

 Face aux menaces généralisées du MES et du Pacte budgétaire contre la démocratie et les droits sociaux, Attac se mobilisera dans le semaines et mois à venir, en France et en Europe, pour imposer des référendums sur le Pacte budgétaire.

 -          Dans cette perspective, Attac se joint aux mobilisations syndicales prévues dans toute l’Europe le mercredi 29 février, pour dénoncer le « Pacte d’austérité ».

-      Avec le collectif pour un audit citoyen de la dette publique (www.audit-citoyen.org), Attac participe à la semaine contre l’austérité du 5 au 12 mars. Des initiatives sont prévues en France contre le Pacte budgétaire, avec un meeting à Paris le 5 mars.

-          Le 31 mars, une journée d’action décentralisée des collectifs locaux se tiendra autour du thème « libérons les peuples des chaînes de la dette ».

 -          Une grande manifestation européenne est prévue le 19 mai à Francfort, pour protester contre l’austérité généralisée et la dérive antidémocratique et antisociale des institutions européennes.

 

Devant l’escroquerie des « plans de sauvetage » de la Troïka, il est essentiel d’envoyer un vrai message solidarité européenne au peuple grec. Une cinquantaine de villes en France et dans le monde ont déjà répondu à l’appel citoyen international « Nous sommes tous des Grecs » et se sont mobilisées, en moins d’une semaine. Cela n’est qu’un début :

 -          Attac soutient l’initiative citoyenne internationale « Occupons les banques, occupons la dette, nous sommes tous des Grecs », et appelle ses adhérents à participer et à organiser aux occupations de banques qui auront lieu les 2 et 3 mars.

 -          Attac France, des partenaires français (FSU, Solidaires, Aitec, DAL...) et européens (Attac Allemagne et Autriche, CEO, CSC - Belgique -, Focus on the Global South, fondation Rosa Luxemburg, CADTM Europe, ELA et ESK du Pays Basque, Arci, Global Project et de European Alternatives - Italie -...) organisent par ailleurs une délégation des mouvements sociaux qui se rendra à Athènes les 28 et 29 février. Nous y rencontrerons les mouvements sociaux et évoquerons des initiatives conjointes contre l’austérité imposée aux peuples.

 

Attac France,

A Paris, le 27 février

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